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régis debray - Page 4

  • Quelle guerre ? Quelle victoire ?...

    Nous vous signalons a parution du numéro 49 de Médium (octobre-décembre 2016), la revue dirigée par Régis Debray. Ce numéro, coordonné par François-Bernard Huyghe, questionne la guerre dans laquelle nous sommes censés être plongés...

     

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    " Notre époque adore voir les vainqueurs - les performants, les populaires, les séduisants, les efficients- ; elle communie dans l'émotion : gagner, c'est vibrer. Mais aimons nous vraiment la victoire, celle qui se remporte après atroce résistance, celle qui brise l'ennemi pour forcer sa volonté, celle qui s'inscrit dans l'Histoire ? Et pouvons nous ?

    Nous sommes, paraît-il, en guerre. D'intérêt et pas de religion dit le pape. Contre le terrorisme dit le président. Contre la barbarie dit le premier ministre. Contre Daesh précisent ceux qui aiment que l'ennemi ait un nom et une adresse (Monsieur al Baghdadi, Califat, pays de Cham, Entre Syrie et Irak). Contre l'extrémisme violent disent les Américains.

    Notre armée intervient au Mali, en Centre Afrique, en Libye et ailleurs. Et ne parlons pas de l'Amérique d'Obama (opérations militaires en Afghanistan, Irak, Syrie, Libye, Yemen, Somalie, Pakistan pour ce prix Nobel de la paix). Tous ces drones, tous ces bombardiers, ces interventions au sol, peut-être, quel triomphe annoncent-ils ? Qu'écrirons-nous dans les manuels et quels monuments pour quelles commémorations ? Ou voulons-nous simplement qu'ils nous fichent la paix, cessent leurs attentats et décapitations en ligne et nous laissent retourner à notre vivre plus ou moins ensemble et à notre mondialisation plus ou moins heureuse ?

    Le djihadisme avec qui nous sommes sensés être en guerre, ne peut ni gagner (pas d'émirat futur à Washington), ni perdre (si chaque kamikaze recrute ses successeurs pour le venger). Plus généralement, nous, occidentaux, malgré notre supériorité technique, ne gagnons plus de guerres tant nos bienveillantes interventions militaires suscitent de nouvelles hostilités.

    Du coup, les médiologues (et quelques praticiens) s'interrogent sur la notion de victoire : il faut savoir la définir et définir l'ennemi, il faut y croire, y faire croire (surtout en persuader le vaincu) ; il gagner la bataille pour la mémoire des peuples. Ce qui nous amène aussi à réfléchir sur la relativité historique de l'idée de guerre victorieuse donc de paix, ou plutôt aux variations de ses représentations. "

    Sommaire :

    Ouverture
    Régis Debray, F.B. Huyghe : La faiblesse des armes

    Vaincre et convaincre
    François-Bernard Huygue : Clausewitz, réveille-toi !
    Paul Soriano : Notre djihad
    Philippe-Joseph Salazar : L'éloquence du massacre
    Margaux Chouraqui : La contamination par l'image
    P.-M. de Biasi et C. Schmelck : Les réseaux du chaos
    Jacques Billard : L’école de la guerre

    La victoire incertaine
    Général V. Desportes : La guerre au sein des populations
    Olivier Kempf : Quand la victoire se défile
    Nicolas Mazzucchi : Le meurtre pour les nuls
    Émeric Lhuisset : Théâtres de guerre
    Pierre Conesa : L’histoire jugera

    Mémoires de guerres
    Monique Sicard :Déboulonnades
    Robert Dumas : Réduire au silence
    Jacques Lecarme : 1918 : quelle victoire ?
    Clément Sigalas : 1940 : quelle guerre ?

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (17)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Avec, pour la dernière de la saison, au sommaire :

    • Baisse du QI moyen en Europe, une information bien référencée qui ne semble pas inquiéter outre mesure nos gouvernants qui continuent de célébrer la "diversité" et d'exiger de leurs populations qu'elles accroissent leur "compétitivité". Concernant le fait que la présence des immigrés en France freine la productivité, se reporter au livre de Christopher Caldwell, Une révolution sous nos yeux, éditions du Toucan, 2011, page 75.
     
     
    • En 2015, et pour la première fois, la population de l'Union européenne a décru malgré l'installation d'au moins 1,9 millions de migrants d'origine non européenne. Ce qui ne dissuade nullement les ONG "humanitaires" de conspuer une "forteresse Europe" qui se fermerait à la "diversité" pour se murer dans le repli sur soi.
     
     
    Natacha Polony, la police de la pensée et le journalisme en laisse. 
     
     
    • Le copinage valeur plus forte que la vertu ? C'est la question que pose l'OJIM après la réintégration de la délicate Agnès Saal au ministère de la culture.
     
     
    Hervé Juvin en libertés, semaine du 27 juin au 1 juillet. L'économiste répond aux questions des téléspectateurs de Tv-Libertés et ses répliques sont percutantes. Le retour du drapeau bleu, blanc, rouge dans les stades / Faut-il accepter les prélèvements automatiques / L'un des arguments du Brexit c'est l'irréversibilité de la construction européenne. Info ou intox ? / Que sont les taux d'intérêt négatifs ?
     
     
    • Selon Bernard Lugan l'Afrique du Nord est dans une phase d'implosion, d'explosion et de perdition (entretien avec Boulevard Voltaire, première référence). En se reportant à son blog on pourra lire ce qu'il écrit de la situation en Libye à la date du 3 juillet (seconde référence). Bernard Lugan vient par ailleurs de faire paraitre un copieux ouvrage consacré à l'histoire de l'Afrique du Nord aux éditions du Rocher et fait l'objet à ce propos d'une interview dans le dernier numéro de la Nouvelle Revue d'Histoire.
     
     
     
    • La diplomatie française au Moyen-Orient par Bruno Guigue. À partir de son expérience personnelle, et de ses propres déconvenues, l'ancien diplomate livre sa pensée sur ce qu'était la politique arabe de la France. Une politique aujourd'hui défunte à force d'erreurs de jugement et de suivisme par rapport aux seuls intérêts israélo-américains dans une région où nous jouons désormais les utilités.
     
     
    • Sur le Moyen-Orient et sa situation géopolitique complexe la polémologue Caroline Galactéros répond aux questions de Charlotte Amadis et de Daoud Boughezala sur le site de Causeur.
     
     
    Michel Drac présente une remarquable analyse du capitalisme néolibéral mondialisé. Celui-ci bute en effet sur des limites technologiques et environnementales qui font apparaitre tout retour de la croissance comme un fable racontée à des enfants. Les oligarchies occidentales, sur la défensive, sont passées dans ces conditions d'une politique de la carotte (redistribution équitable de la plus value entre le capital et le travail) à celle du bâton (prédation financière et casse sociale) dont le terrain privilégié semble bien être l'Europe, ventre mou de la scène mondiale. La présente intervention se situe dans le droit fil de son dernier ouvrage Triangulation, repères pour des temps incertains paru en octobre 2015 aux éditions Le retour aux sources.
     
     
    • Dans une magnifique série de dix émissions (une heure chacune) consacrées à l'histoire, Régis Debray donne toute la mesure de son talent. Si il fallait faire une sélection parmi ces chroniques étincelantes notre choix se porterait sur l'histoire de la construction européenne et aussi sur celle ayant trait au sacré et à ses avatars.
     
     
    Jérôme Leroy, rédacteur en chef du pôle culture de Causeur expliquait avant que le match n'ait lieu les raisons pour lesquelles il souhaitait la victoire de l'Islande sur la France.
     
     
    Éric Zemmour ironise sur cette gauche qui aime les perdants magnifiques, qui préfère Poulidor et déteste Anquetil, qui célèbre Michel Rocard comme elle adule Pierre Mendès France mais porte le florentin Mitterrand au pouvoir pour réaliser le programme de Terra Nova que véhiculait la deuxième gauche incarnée par Rocard, un idiot utile en quelques sortes dont Alain Finkielkraut juge qu'il est resté prisonnier d'un vision trop étroitement économique du monde. Cependant la pratique politique de cet esprit  brillant et torturé plus marquée par les échecs que par les succès ne manquait pas d'une certaine noblesse; mais peut-on être un politique accompli quand on manque à ce point de cynisme ? 
     
     

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    A propos du Brexit
     
    • Réaction d'Alain de Benoist, après le Brexit. Le Royaume uni s'est toujours senti plus proche des États-Unis (le "grand large") que de l'Europe, où il n'a cessé de jouer le rôle d'un cheval de Troie atlantiste et dont il n'a jamais pleinement accepté les règles. En ce sens, le divorce met fin à un mariage qui n'avait jamais été vraiment consommé.
     
     
    • Pour Hubert Védrine l'Union européenne devenue une énorme machine à normaliser s'est égarée dans un océan de règles ubuesques. Afin de répondre au décrochage généralisé que les peuples lui opposent il propose que l'on arrête de se faire peur avec le mythe du retour nauséabond des années 30, et l'adjonction dans le processus d'une véritable subsidiarité faisant toute sa place au maintien des nations souveraines et à l'identité des peuples. Constatant que depuis Lisbonne, rejeté par referendum mais ratifié par le Parlement on n'est plus dans la démocratie, il se lamente de la cécité d'élites qui ne veulent jamais se remettre en cause ce qui est la principale raison de la montée des populismes et propose d'user du choc du Brexit pour repenser l'Union européenne en profondeur.
     
    • Pour Jean-Michel Quatrepoint, le Brexit révèle la défaite de l'idéologie néolibérale de Reagan et de Thatcher. Si l'Europe prend son indépendance vie à vis des États-Unis, elle pourra exister comme puissance par la coopération des nations qui la constituent.
     
     
    Éric Zemmour réagit au vote des Britanniques en faveur du Brexit et aux réactions qu'il a suscité. De l'ironie bien sûr et beaucoup de réalisme.
     
    • Dans son émission I-média du premier juillet (Tv-Libertés) Jean-Yves Le Gallou se consacre pour l'essentiel au traitement médiatique du Brexit qui a donné aux journalistes une remarquable occasion de faire la preuve de leur sectarisme (première référence). Dans le numéro du 8 juillet Jean-Yves Le Gallou se penche sur le conférence de le rentrée de France Télévision. Décryptage d'I-Média. Le Brexit encore où l'émission souligne avec ironie que les "élites" doivent se soulever contre les masses ignorantes et teigneuses; mais cela fait plus de 20 ans que Christopher Lasch avait analysé ce phénomène symptomatique de notre époque dans La révolte des élites et la trahison de la démocratie éditions Flammarion pour l'édition française de 1996 (seconde référence).
     
     
     
    Clément Sirdey se moque bien quant à lui des diatribes nostradmesques des éditocrates européistes annonçant les sept plaies d'Égypte pour la Grande Bretagne après sa sortie de l'Union. Il rappelle cette forte parole de Jean-Claude Juncker destinée à s'inscrire dans le bêtisier de l'arrogance : "il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européen".
     
     
    • Sombrant dans les ténèbres de l'obscurantisme le peuple britannique a opposé un non catégorique à son maintien dans l'Union européenne. C'est du moins l'interprétation que donne, parmi bien d'autres, un homme de l'élite éclairée qui sait par définition ce qu'est l'intérêt du peuple dans son blog de L'ExpressMathieu Bock-Côté répond aux propos hyperboliques de BHL dans une tribune bienvenue du Figaro. Titre de sa chronique "Le peuple contre les despotes éclairés".
     
     
    • Un tout autre son de cloche avec sa suffisance Bernard-Henri Botul. Après avoir pronostiqué la défaite du Brexit, il écrit dans sa revue La règle du jeu : "Assez de ces relents nationalistes rances, assez de ces peuples qui dressent des murs avec leurs voisins, soyons modernes, irréprochables, inspirons nous du génie du judaïsme et prenons exemple sur Israël, phare des nations". Il est évident, sauf pour les demeurés, que "le phare des nations" ne dresse aucun mur pour se séparer de ses voisins. BHL serait-il adepte du double discours ? 
     
     
    • L'intellectuel britannique Phillip Blond donne son avis circonstancié sur le Brexit dans un intéressant entretien accordé au Figaro. Théoricien du Red Toryism il dresse un diagnostic sans appel de la situation en Occident et déclare : "Le vote en faveur du brexit exprime le plus grand rejet de la mondialisation qu'ait connu dans les urnes le monde occidental. Les bénéficiaires de la mondialisation, tous ceux qui culturellement comme financièrement se trouvent en phase avec le nouvel ordre du monde, sont désormais minoritaires dans la société".
     
     
    • Comment l'Union européenne a sacrifié en trente ans ses classes moyennes et sabordé son modèle social au bénéfice d'une minorité de privilégiés. Euthanasie en règle sur l'autel d'un libre-échangisme à l'échelle planétaire. Une analyse exemplaire de Véronique Nguyen, professeur affiliée à HEC, qui conclue qu'il n'est guère surprenant dans ces conditions que ces catégories lésées expriment leur colère et leur frustration par des votes iconoclastes qui laissent les élites médusées. 
     
     
    • Le FN principal gagnant du Brexit ? Bonne analyse.
     
     
    • Selon Bruno Mégret le Brexit ne changera pas la donne au Royaume Uni. Il considère cette sortie comme un symptôme et non comme un remède de la maladie bruxelloise. Si il se refuse à l'Union européenne telle qu'elle se trouve configurée aujourd'hui, il est partisan de la conserver à condition de la transformer en une machinerie de puissance se préoccupant de l'identité de ses peuples en mettant fin à l'immigration et en organisant la remigration, ce que le départ de la Grande-Bretagne pourrait rendre possible puisqu'elle a toujours voulu une Europe de l'atlantisme et du libre-échange.
     
     
    Jean-luc Mélenchon, en pleine forme à propos du Brexit, déclare au Parlement européen le 5 juillet que l'Union européenne, "soit on la change, soit on la quitte".
     
     
    • Devant une UE qui s'effiloche Jacques Sapir s'applique à penser l'avenir des nations européennes.
     
     
     
    • Les séides de l'oligarchie qui siègent à la Commission européenne n'ont pas de souci à se faire. Après le Brexit ils pourront toujours se recaser chez Goldman Sachs à l'image de leur ancien patron José Manuel Barroso dont le parcours, depuis qu'il dirigeait le mouvement maoïstes portugais, se révèle exemplaire. Du col Mao au Rotary il n'y a qu'un pas, et beaucoup de reptations couronnées par ce bâton de maréchal qui sonne comme l'aveu de services rendus (première référence). Comme le note très justement Michel Onfray dans sa dernière chronique mensuelle, ne pèse sur Barroso et ses semblables  aucune fatwa. C'est la grande différence avec Alain de Benoist (seconde référence). Suit la pluie de critiques politiciennes qui a suivi cette annonce de la banque. Elle permet de mesurer la duplicité de la plupart de nos dirigeants (troisième référence). Enfin le jugement de Maxime Tandonnet selon qui ce parachutage bardé d'or ne peut que renforcer les soupçons de l'Europe d'en bas vis à vis des connivences de l'Europe d'en haut avec "la finance mondiale" et ainsi favoriser le "populisme" en vérifiant un de ses principaux arguments (quatrième référence).
     
     
     
     
     
     
    • Démocratie ? Les curieuses conceptions que s'en fait "l'expert" François Jost, chroniqueur de L'Obs, ou quand le galimatias rhétorique ne parvient qu'à démontrer l'inanité d'un discours emberlificoté plaidant pour une démocratie sublimée qui se passerait des électeurs.
     
     
    • Certains authentiques "démocrates" semblent partisans d'une euthanasie des vieux électeurs britanniques. Leur remarques désobligeantes montrent l'indigence de leur raisonnement. En effet ces commentateurs ne semblent pas se rendre compte qu'en France comme en Autriche ce sont les électeurs sénescents qui constituent l'obstacle principal à la victoire du "populisme" ? Ci-joint un article de Richard Dessens pour Euro-Libertés.
     
     

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    • Analyse du récent ouvrage d'Alexandre Latsa Un printemps russe (Édition des Syrtes) par Bernard Mazin sur Polémia (première référence). Alexandre Latsa s'entretient avec Jean-Michel Vernochet sur le printemps russe et la diabolisation de Poutine et de la Russie par les médias (seconde référence). Enfin il répond aux questions de Télé-Libertés (troisième référence).
     
     
     
     
     
    Paul Moreira, candide journaliste d'investigation qui s'était rendu célèbre par son documentaire non conforme intitulé Ukraine. Les masques de la révolution diffusé en février dernier sur Canal +  explique comment la perception d'un événement est filtrée par les médias censeurs. Il met en cause dans cet interview le manichéisme des grands organes de presse occidentaux en accord avec les manipulations du département d'État américain et des néo-cons. Ceux-ci agitant pour leurs basses oeuvres les milices nationalistes ukrainiennes avec la complicité active de l'Union européenne.
     
     
    • S'interrogant sur l'épistémé de la post-modernité occidentale le penseur croate Jure Georges Vujic note que la rétrospective loin d'être une simple mode est devenue une stratégie de marché du capitalisme tardif qui récupère et commercialise les idées, les mythologies, les produits de la "subversion" et la contre-culture libertaire de gauche dans un recyclage sans fin du vintage. Brillant développement sur le pastiche et l'histoire comme marchandise.
     
     
    • Conflits numéro 10 vient de paraitre (juillet-septembre). Éditorial de Pascal Gauchon. Au sommaire, les enjeux du sport, entretien avec Pascal Boniface, portrait de Lavrov par Frédéric Pons, le retour de l'armée russe, la grande stratégie de Frédéric II
     
     
    • Belle et brillante critique du dernier livre d'entretiens donnés par Rémi Brague, Où va l'histoire par Pierre Le Vigan. Rémi Brague est philosophe de profession spécialisé dans la philosophie chrétienne et musulmane de l'époque médiévale.
     
     
    • Critique laudative du Putain de Saint Foucault  de François Bousquet par Thierry Durolle sur le site d'Europe Maxima.
     
     
    François Bousquet rédacteur en chef adjoint de la revue Éléments s'entretient avec la rédaction de Rébellion sur le cas de Jean-Edern Hallier.
     
    • Le grand malaise des agriculteurs français lancés dans une course à la modernisation sous peine de mort rapide. Étranglé par les normes toujours plus complexes, toujours plus contraignants ils sont forcés à définir leur voisins comme des ennemis illustrant ainsi la doctrine libérale de la guerre de tous contre tous.
     
     
    • Éditorial du nouveau numéro de la la Nouvelle Revue d'Histoire (juillet-août 2016) par Philippe Conrad, son directeur, et sommaire.
     
     
    • L'entretien avec Jean Haudry publié dans la Nouvelle Revue d'Histoire (hors-série numéro 11) est désormais disponible sur le site de l'Institut Iliade. Il s'agit d'une critique du livre négationniste de l'archéologue Jean-Paul Demoule intitulé Où sont passés les Indo-européens ?
     
     
    • Le site theatrum belli publie un texte d'Alain de Benoist consacré aux héros et aux "péchés du guerrier" dans la tradition indo-européenne.
     
     
    • Les conséquences de l'ethnocide des Amérindiens au Canada.
     
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  • L'idée comme force !...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de François-Bernard Huyghe, cueilli sur son site et consacré à l'idéologie. Spécialiste de la communication et de la guerre de l'information, François-Bernard Huyghe est l'auteur de nombreux essais et a publié dernièrement La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2016).

     

     

     

     

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    Idéologie : l'idée comme force

    Comment parler de façon non idéologique de l'idéologie (dont on sait bien que c'est l'idée de l'Autre) ? La définir, c'est se poser en maître de vérité, dévoilant aux égarés les leurres dont ils sont dupe : ceci est la vérité (ou de la science, ou la réponse technique, ou voici une vision pragmatique du monde tel qu'il est) cela est l'idéologie !

    La plupart des définitions de l'idéologie insistent sur son côté :

    
- irréel (irréfutables, parce qu'insensibles au démenti). L'idéologie (souvent assimilée à une maladie de l'idéalisme qui prendrait ses rêves pour des réalités) est alors une machine à décoller du concret et du vérifiable, à imaginer de fausses espérances, des explications fallacieuses, une pseudo logique dans les événements, à balayer toutes les critiques ou les objections de la raison, à réinterpréter les faits dans le sens qui arrange « Une idéologie est précisément ce que son nom indique : elle est la logique d’une idée….L’émancipation de la pensée à l’égard de l’expérience. » disait Hananh Arendt. L'idéologie est donc surtout non-vraie dans cette perspective.

    - "bricolé" : l'idéologie n'est pas totalement délirante. Simplement mêlant des discours pseudo-rationnels, présentant une cohérence et une logique relative, elle trouve des explications et forge une apparente cohérence explicative ou prospective. Elle imite la science mais n'est qu'un système de représentations qui donne réponse à tout, et qui est symptomatique des préconceptions de celui qui le formule et qui s'auto-illusionne plutôt qu'une démarche pour approcher de la réalité. L'idéologie, c'est du vrai, plus du faux, plus du spéculatif, plus de l'indécidable, plus du douteux formant un tout. L'idéologie est inconsistante.

    - son caractère de "fausse conscience", ou vision "inversée" de la réalité. Cest ici la définition marxiste classique. Les hommes qui ont des positions de classe formulent des systèmes intellectuels pour s'expliquer le monde tel qu'il leur apparaît (donc avec toute la subjectivité due à leur position historique). Ces systèmes, qui reflètent en réalité leurs intérêts, ils les prennent pour des vérités universelles et souvent même les dominés, à rebours de leurs intérêts réels adoptent l'idéologie que leur imposent les dominants. C'est par exemple une idéologie qui décrit comme naturel, juste et conforme à la raison un monde où les dominants dominent et où les dominés ne se révoltent pas. Mais les marxistes ajoutent que l'on peut échapper à la malédiction de la fausse conscience et produire de la science. Certes, par un effort intellectuel (la production théorique) mais aussi et surtout en adoptant le point de vue de la classe "universelle", le prolétariat, appelé à réaliser les potentialités universelles de l'homme et de la raison humaine. Bien sûr, les malins remarquent que les raisonnement est un peu circulaire : tandis que vous, vous faites de l'idéologie (ce qui démontre combien vous êtes égaré par vos intérêts de classe, comme je peux le montrer scientifiquement) ; moi, je dis la vérité parce que le marxisme est scientifique, il est scientifique parce qu'il correspond au mouvement historique de la réalité, il y correspond parce que je dis la vérité. Vous ignorez cette vérité parce que vous êtes dans l'idéologie. Dans cette optique, l'idéologie est un aveuglement symptomatique.


    - "légitimant". L'idéologie n'est pas une méthode pour résoudre des questions et pour juger, par exemple, si quelque chose est souhaitable (ainsi : un certain type de régime politique), elle le présuppose au départ. Elle est une réponse déguisée en question ou une valeur qui cherche réalisation mais se prend pour une rationalité. Elle part de ce qu'elle devrait prouver à la fin (ce qui est juste, ce qu'il faut faire ou au contraire, ce qu'il faut supprimer, la cause des malheurs du monde) et conclut forcément là où elle voulait mener. L'idéologie est un moyen au service d'une fin.



    Les quatre visions ne sont, du reste, pas incompatibles (l'on peut, par exemple, penser que les hommes bricolent des pseudo-explications avec des faits pour légitimer des valeurs, parce qu'ils sont victimes d'une fausse conscience...). Il est permis de penser qu'elles ont toutes leur part de vérité, dans la mesure où elles décrivent le rôle des idéologies. Une idéologie, ce n'est pas seulement une idée à laquelle on peut adhérer ou pas, ce n'est même pas un corpus, un ensemble de notions et affirmations ayant une relation de cohérence entre elles, c'est un code : une machine à produire de nouvelles interprétations conformes aux finalités du modèle. Une idéologie permet tout à la fois de rêver, de croire que l'on possède une explication du monde, de s'imaginer que l'on échappe à l'idéologie (c'est une différence avec la foi : chacun dit "je le crois parce que c'est ma religion", personne ne dit "je le crois parce que c'est mon idéologie"). Enfin l'idéologie sert à rentrer dans une communauté (avec tous ceux qui partagent la même vérité que vous) et, ce n'est peut-être pas le moins important, à se faire des ennemis. Où au moins à désigner le mal : l'idéologie adverse. Toute idéologie est en effet une "pensée contre" qui s'oppose aux idées mauvaises ou fausses (ce qu'elle nomme justement "idéologies"), ne vit que dans le conflit avec elle et avec une autre communauté de croyants et se condamne par là même à convaincre sans cesse, à augmenter les nombre de ses adhérents (au détriment de l'erreur et du mal). Du reste on reconnaît assez bien un discours idéologique à ceci qu'il explique qu'il faut se battre pour libérer l'humanité du poison des idéologies perverses : néolibéralisme, nationalisme archaïque, islamisme, tiers-mondisme anti-américain, utopisme altermondialisme, populisme sécuritaire fascisant suivant le cas..

    
En fait l'idéologie pose une question 
- philosophique : qu'est-ce que la vérité ? la doxa (l'opinion communément admise) ? l'erreur ?
- épistémologique : comment se fait-il que l'on arrive à des conclusions ou bien vraies ou bien fausses ou bien fallacieuses (parfois à partir des mêmes éléments d'information) ? comment accéder à la connaissance vraie en évitant le piège de l'idéologie ?
- historique et politique : est-ce l'idéologie qui gouverne l'action des hommes ? n'y a-t-il rien à faire pour leur faire adopter une conduite raisonnable ? l'idéologie est-elle secondaire par rapport à d'autres facteurs déterminants comme les intérêts géopolitiques ou l'économie ?
- psychologique ou sociologique : comment se fait-il que tel individu ou tel groupe se rattache à telle idéologie ? et qu'il puisse en changer ?

L'auteur de ces lignes n'a aucune prétention à les résoudre. En revanche, il serait se permet de préconiser une approche médiologique.
En l'occurrence, il ne s'agirait plus de poser la question de l'idéologie dans son rapport à la connaissance vraie, ni aux valeurs justes, mais dans sa relation avec l'action. L'idéologie n'est pas faite (uniquement) pour expliquer le monde, mais pour le changer : son adoption, le nombre et la qualité de ses adeptes est censé produire un changement politique, à se traduire en un nouveau rapport de pouvoir ici et maintenant.
C'est une idée qui veut devenir une force. On nous objectera qu'il existe des idéologies conservatrices, dont la fonction est précisément de nous convaincre qu'il ne faut rien changer d'essentiel dans le réel tel qu'il est, et que nous devons continuer à croire et à faire ce que nous avons toujours cru et fait.
Mais, si ce sont vraiment des idéologies qui se défendent et se propagent (et non des cultures dans lesquelles on baigne et qui se transmettent), elles sont obligées d'appeler à un combat contre la subversion, l'erreur, la menace... Elle créent par là même un certain dynamisme : il leur faut sans cesse produire des contre-arguments, des projets, des enjeux..


    Une idéologie, c’est une force en marche, une idée de tête en tête. Elle a besoin de vecteurs et relais. Toute idéologie veut changer le monde sous couleur de l’interpréter. Son succès dépend de configurations stratégiques et techniques qui lui confèrent plus ou moins d’impact. On l'adapte et on l'adopte : elle s'intériorise.

    Pour cela, il faut des médias pour transmettre le message (et, si possible, étouffer le message contraire), Il faut s'adapter à un milieu à conquérir et il faut enfin et surtout une stratégie et des gens. Une stratégie pour propager l'idéologie, par exemple une technique de prosélytisme ou de propagande. Il faut des gens pour commenter, illustrer et faire passer l'idéologie. Selon les lieux et les époques, ces gens là se nomment des missionnaires, des militants, des journalistes, des intellectuels, des minorités actives...
La propagation d'une idéologie requiert donc :

    - le bon message. Le bon message est certes "persuasif" donc capable d'entraîner la conviction de celui qui le reçoit par une démonstration (administration de preuves dont éventuellement des preuves par l'image, mais aussi raisonnement amenant le destinataire aux mêmes conclusions que vous), mais il est aussi émotif. Au-delà de la question de la démonstration rationnelle ou pseudo-rationnelle, il s'agit aussi de toucher la corde affective, de provoquer des sentiments d'admiration, de répulsion, d'indignation, d'enthousiasme, etc.

    Mais aussi d'amener le destinataire à croire que les conclusions qu'il retire coïncident avec des valeurs fondamentales de liberté, de justice, etc.

    Nous retrouvons là une vieille recette de la rhétorique antique : logos plus pathos plus ethos. Avec cette différence que l'idéologie ne doit pas seulement persuader d'un fait passé ou futur (Untel est innocent, telle loi contribuera à la prospérité du pays), elle ne doit pas seulement amener à certaines généralisations intellectuelles (le capitalisme a provoqué la crise, donc il faut imaginer un autre système,ce régime islamiste viole les droits de l'homme donc il faut établir une démocratie laïque partout dans le monde), elle doit inciter à s'engager ou à agir (au minimum : voter, soutenir), du moins à adopter un ensemble de cadres de pensée. Ils permettent à l'idéologie de s'auto-reproduire. Nous entendons qu'elle amènera le néophyte à choisir à l'avenir la réponse conforme à l'idéologie (la crise semble s'atténuer, donc les rares mécanismes étatiques subsistant pour contrôler l'économie sont indispensables face au excès de l'ultra-libéralisme, ce régime islamiste organise des élections, donc elles sont truquées). Précisons que le fait que le message se révèle ou bien faux ou bien vrai (au sens de : confirmé par les faits) ne change rien à son efficacité.


    - le bon média. Pour remplir les cerveaux, il faut pouvoir les atteindre. Ne serait-ce que pour les immuniser contre les messages adverses. D'où la nécessité suivant les époques d'avoir une collection chez un grand éditeur toute dévouée à votre chapelle intellectuelle, de lancer un journal militant reflétant les thèses de votre parti, de financer une télévision internationale d'information favorisant l'influence de votre pays ou d'établir un réseau de vos partisans présents sur les forums et les sites.

    - le bon milieu. Ce qui s'entend dans les deux sens : il faut envoyer le message par des vecteurs et avec le soutien de relais efficaces dans des termes qui correspondent à la culture au sens large de leurs destinataires. Il faut que l'interprétation qu'il fera de l'idéologie coïncide avec ce qu'il sait, ce qu'il croit, ce qu'il respecte et ce qu'il refuse. Mais la règle du milieu vaut dans l'autre sens : l'idéologie ne prospère qu'autant que ses partisans peuvent se rencontrer, se renforcer mutuellement, que si elle est cohérente avec leurs valeurs ou leur expérience quotidienne. Nous serions tentés d'ajouter cyniquement : que s'ils ont intérêt à la produire ou à la diffuser (par exemple pour leur carrière, pour être bien vus dans leur milieu social...). Le problème commence quand deux milieux se rencontrent, par exemple quand le milieu des think tanks, de la haute administration ou de l'armée US veulent convertir à leur idéologie un montagnard parlant pachtou et membre d'une tribu aux traditions guerrières et patriarcales. "Les filles doivent voter et aller à l'école car cela renforce le sentiment d'égalité autant que les libertés démocratiques et leur contribution à l'économie augment la prospérité, surtout dans le cadre du développement durable." est un exemple de contenu idéologique à réadapter dans le cas évoqué.

    - les bonnes médiations. Nous entendons par là les groupes et institutions qui formeront le biotope intellectuel de l'idéologie et lui permettront de croître et de prospérer. et de trouver de nouveaux repreneurs.

    Dans toute société, on peut considérer que toute institution - comme une église, une école, l'armée - remplit, comme de surcroît, une fonction idéologique qui consiste à inculquer des valeurs et des croyances. Elles le font de haut en bas, de l'aîné ou du supérieur vers le plus jeune et l'inférieur et ceci sans aucune hypocrisie : il s'agit d'inculquer, de former...

    Mais d'autres organisations répandent l'idéologie de manière plus horizontale ou plus indirecte. Celles que nous avons nommé Organisations Matérialisées d'Influence. Une société de pensée, une ONG, un think tank, ou à plus forte raison un parti (qui en fait une de ses ambitions avouées) répandent une idéologie : ces groupes passent leur temps à faire entrer "des idées dans la tête des gens", car leur existence dépend du nombre et de l'importance de ceux qui partagent leurs visions ou leurs valeurs. Un médecin qui soigne des enfants à l'autre bout du monde répondra peut-être que son dévouement au service d'une ONG n'a rien à voir avec l'idéologie : il répond à une urgence humanitaire. Il suit une morale naturelle de la compassion qui pousse un être humain à aider un être humain. Du point de vue moral, notre médecin a parfaitement raison et il n'y a aucune raison de le soupçonner d'avoir des desseins politiques cachés (répandre la civilisation occidentale auprès de peuples "inférieurs", ou compenser par un peu de charité ce que le capitalisme a de sauvage aux yeux des gens du Sud, par exemple). En revanche, en amont, si nous regardons toute la machinerie qui a permis audit docteur d'arriver sur place, nous rencontrons une association qui a pignon sur rue, reçoit des fonds du public, fait parfois de la publicité à la télévision et dont le succès dépend largement d'une image de marque. Or, pour bien faire tout cela, l'ONG doit s'appuyer sur une idéologie, noble et juste peut-être, mais idéologie quand même, qui est celle des droits de l'homme, des "french doctors" et de l'urgence humanitaire dans un monde sans frontière.

    D'une certaine manière, même un lobby est "idéologique". Non pas que ses membres aient des convictions sincères : le plus souvent ils agissent parce qu'ils sont payés par un client. Par ailleurs, ils sont censés défendre des intérêts et absolument pas des idéaux ou des idées. Mais dans leur "plaidoirie", car leur rôle est, après tout, de plaider pour une cause comme des avocats, ils doivent s'adapter à l'idéologie dominante. Ils doivent, par exemple (voir la rubrique "milieu" plus haut) convaincre leur interlocuteur membre d'une Organisation Internationale Gouvernementale que la proposition qu'ils avancent va parfaitement dans le sens du développement durable, de la bonne gouvernance, de la société de l'information... et autres notions qui sont inculquées à tout fonctionnaire international (y compris l'auteur de ces lignes qui l'a été en son jeune temps).En ce sens, même si nous croyons baigner dans les évidences morales (l'urgence, les droits de l'homme, la démocratie, la société civile) ou dans les évidences scientifiques et techniques  (le réchauffement planétaire, la croissance verte, le rôle indispensable du marché), nous vivons dans un monde où croît le rôle de l'idéologie (dont on trop tôt claironné la mort dans les années 90, comme on l'avait déjà fait dans les années 60 avec l'avènement de la "société post-industrielle").

    Comme le dit Régis Debray « L’idéologie n’est pas l’antithèse d’un savoir ou d’une réalité, comme illusion, méconnaissance ou fausse conscience, mais la forme et le moyen d’une organisation collective. Ce n’est pas une modalité du voir, mais une contrainte du faire.» 


    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 4 juin 2016)

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  • La revue de presse d'un esprit libre... (8)

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    La revue de presse de Pierre Bérard

    Au sommaire :

    Thibault Isabel (rédacteur en chef de la revue Krisis) trace pour le cercle Henri Lagrange un beau portrait politique de Pierre-Joseph Proudhon, l'un des principaux théoricien du socialisme. 
     
    • Contre la démocratie de l'informe et son délitement qui n'engendre que chaos et humiliation, le sociologue Jean-Pierre Le Goff plaide pour une vigoureuse réforme intellectuelle et morale européenne.
     
     
    Christopher Caldwell, journaliste américain qui avait publié en 2011une excellente Révolution sous nos yeux (Le Toucan) dans laquelle il notait que l'islam allait grandement transformer la civilisation européenne réagit aux attentats de Bruxelles. Il déclare que les élites françaises seraient moins perturbées par un parti islamiste au pouvoir que par le Front national et il pointe la complicité des classes supérieures et des nouveaux arrivants au dépens des classes populaires et des classes moyennes (démonstration de Christophe Guilluy). À propos de la laïcité cette remarque très juste qui illustre parfaitement le retournement auquel nous sommes confrontés, "la France invoque aujourd'hui, pour faire entrer les musulmans dans la communauté nationale, des règles destinées à expulser les catholiques de la vie politique".
     
     
    • Chronique d'Alain de Benoist sur Boulevard Voltaire. En prenant ses distances avec les clichés habituels il traite cette fois des motivations des terroristes de Daech.
     
     
    • "Qui est l'ennemi ?", résumé très intéressant des interventions des sixième Assises nationales de la recherche stratégique du CSFRS (décembre 2015). À propos de Daech et du terrorisme en Europe.
     
     
    • Le médiologue Régis Debray réfléchit à haute voix sur le thème du terrorisme et de la communication, lors des assises évoquées précédemment. Selon lui on ne vaincra pas une conception du monde à coup de missiles et "déclarer la guerre" aux fous de dieu est une folie...
     
     
    • Pour Marc Crapez les attentats sont dus essentiellement au fait que se sont constituées des enclaves immigrées au cœur de l'Europe.
     
     
    Pierre Milloz voit dans la submersion migratoire de l'Europe un suicide auquel celle-ci n'oppose qu'une résignation passive, quand ce n'est pas des acclamations de joie, 
     
     
    • L'Observatoire des Journalistes et de l'Information Médiatique (OJIM) se demande pourquoi les journalistes se sont fait le service com du gouvernement dans sa scandaleuse campagne contre la "haine" qui est un pur déni des réalités observables.
     
     
    • Pour Éric Zemmour "le réel est entré par effraction au gouvernement" mais cela n'a duré qu'un bref instant. Comme disait Guy Debord dans La Société du spectacle : "Dans le monde réellement  renversé, le vrai est un moment du faux" (1967).
     
     
    • L'ensemble des articles du Monde Diplomatique à propos du grand marché transatlantique. 
     
     
    Marcel Gauchet s'entretient avec Olivier de Lagarde sur France info le 29/03/2016. Discussion autour de son livre Comprendre le malheur français (Stock). En deux épisodes.
     
     
    Éric Verhaeghe, énarque défroqué et ancien administrateur des URSSAF affirme tranquillement que pour défendre l'intérêt général il faut être dissident
     
     
    Myret Zaki journaliste suisse d'origine égyptienne montre comment le combat "moral" des États-Unis contre le secret bancaire suisse n'a servi qu'à rapatrier chez l'oncle Sam nombre d'avoirs financiers internationaux où il leur est garanti d'échapper à la "transparence". La raison (fiscale) du plus fort est toujours la meilleure.
     
     
    • La sénatrice de l'Orne, Nathalie Goulet, qui avait posé une question écrite iconoclaste mais bien légitime au secrétaire d'Etat chargé du budget à propos de la défiscalisation des dons à Tsahal, une armée étrangère semble-t-il. Il est ahurissant que de tels dons puissent donner lieu à une réduction d'impôts. Les  réductions d'impôts pour dons sont, en France, censés compenser des dépenses qui devraient autrement être assurées par l'impôt, et l'impôt sert avant tout à financer les services d'intérêt général. Pas à financer les intérêts étrangers, et encore moins des armées étrangères. Qu'en serait il si ces cadeaux étaient effectués au profit de l'armée de la Corée du Nord, de l'Iran, ou de la Russie ? Il n'empêche Nathalie Goulet, immédiatement soupçonnée d'antisémitisme par les faibles d'esprit, a reçu des menaces de mort.
     
     
    • Sur son blog Caroline Galactéros voit dans les attentats qui ont frappé la France et la Belgique l'effet de réseaux qui ont pu profiter du concours de larges parties de la communauté musulmane pour organiser leur logistique. Elle souhaite que le communautarisme béat et la tolérance publique à l'abri desquels ils ont pu prospérer ne fassent plus désormais l'objet d'un déni de la part de nos élites politico-médiatiques. Pour l'heure, cette aspiration demeure un voeu pieux et le restera tant que les dites élites se refuseront à voir ce qu'elles voient et persisteront à se référer à des analyses qui évacuent l'appartenance de tous les terroristes à une religion particulière. Caroline Galactéros quant à elle privilégie les apports d'ordre culturaliste d'Hugues Lagrange et le point de vue de Marcel Gauchet pour qui la prégnance de l'individualisme juridique rend impossible le traitement de la dimension collective du phénomène.
     
     
    • "L'Occident et la Turquie, un sale jeu qui dure" par Willy Wimmer. Wimmer a été durant une trentaine d'années député CDU au Bundestag et secrétaire d'État. Selon lui l'espoir caressé par la chancelière Merkel de parvenir à un accord avec la Turquie pour résoudre le problème des "réfugiés" relève d'une chimère, tant que l'Allemagne soutiendra les revendications des kurdes d'Asie mineure.
     
     
    • Syrie : un journaliste américain dévoile la réalité. Robert Fisk est le correspondant  de The Independent pour le Proche Orient.
     
     
    • Syrie : imbroglio fatal pour les sponsors de la guerre civile. Quand des terroristes armées par le Pentagone combattent ceux armés par la CIA...
     
     
    • Le point sur la situation militaire en Syrie et en Irak par le colonel Michel Goya.
     
     
    • Réveiller la France chrétienne ? Après le rachat de la relique de Jeanne d'Arc, le fondateur du Puy du Fou se réclamant du roman national oppose une Angleterre jalouse de son passé à une France déracinée qui s'effondre sur elle même ("un peuple qui n'a plus de légende meurt de froid"). Philippe de Villiers évoque avec candeur (et talent) le "mystère français",  "l'anneau de dévotion", figure allégorique qui pour les uns avait des pouvoirs maléfiques et pour les autres bénéfiques. Une jolie légende bien mise en scène par les animateurs du Puy-du-Fou pour le plus grand bonheur de la France patriote et catholique.
     
     
    • La délitescence des hommes et femmes d'État européens face à l'offensive terroriste vue par le colonel Goya qui n'hésite pas à traiter Manuel Valls, notre chef de guerre, de substitut de plastique...
     
     
    • Colère chez les festivistes bruxellois. Tandis que sur la place où ils célébraient le vivre-ensemble dans une interminable kermesse à Neu-neu, glorifiant ainsi la cause des effets dont ils sont victimes, quelques centaines de jeunes gens, immédiatement présentés par les médias comme de vulgaires hooligans fascisants et racistes, ont déboulé sur l'étalage de fleurs, de nounours, de dessins à la craie, et de proclamations en globish pour y crier quelques slogans simples et y afficher leur détermination virile. Cette brutale intrusion du dissensuel a entravé quelques instants l'orgie lacrymale des bisounours qui s'imaginent dans leur coupable (mais innocente) stupidité que l'on peut opposer avec succès les bons sentiments aux cinglés de l'explosif et de la kalachnikov. Fiça, les amateurs décérébrés d'amour universel ont brisé net leurs gémissements et ont entonné en réplique à cette immixtion le vigoureux cantique "première, deuxième, troisième génération; nous sommes tous des enfants d'immigrés" prouvant par là qu'à l'enchère de l'idiot utile leur bêtise n'avait pas de prix. Par la grâce d'une formule aussi mensongère qu'elle est frappante et concise, ceux pour qui l'ennemi n'existe pas s'en définissaient un unique : le petit gars de chez-nous en lieu et place du barbare islamiste qu'ils osent à peine nommer de crainte d'enfreindre l'interdit sacro saint de l'amalgame. Dans le même temps on apprenait que le Conseil des Théologiens musulmans de Belgique avait refusé de réciter une prière dédiée aux victimes des attentats car celles-ci n'étaient pas toutes musulmanes... De quoi décourager nos bobocrates s'ils n'étaient rétifs à ce qu'ils entendent et à ce qu'ils voient.
    On trouvera ci-jointe une réaction de Jean Ansar (Métamag) suivie d'un billet du très catholique Richard Millet à propos de l'unanimité stupide qui accueille les attentats de Bruxelles.
     
     
     
    • Sur Causeur Daoud Boughezala rend compte de la cérémonie d'hommage à Mireille et Jacques Renouvin auxquels une place de Paris a été dédiée. On appreciera le paradoxe d'une Anne Hidalgo au garde-à-vous devant un ancien de L'Action Française...
     
     
    • Une poussive étude de la Fondation Jean Jaurès rédigée par Stéphane François consacrée à "L'écologie, un enjeu de l'extrême droite". Le but de cette analyse : "Laver l'écologie du soupçon d'être un milieu réactionnaire".
     
     
    • Un probable deuxième site viking découvert à la pointe sud Terre Neuve.
     
     

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  • Le retour du peuple...

    Les éditions du Cerf viennent de publier un essai de Vincent Coussedière intitulé Le retour du peuple - An I. Agrégé de philosophie et élu local, Vincent Coussedière est l'auteur d'Eloge du populisme (Elya, 2012).

     

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    " Tous en appellent à la France. Certains prétendent sauver la Nation. D’autres la République. D’autres encore, la Démocratie. D’où viennent ces oppositions. Elles paralysent l’action et sont suicidaires. Comment réconcilier ces faux contraires ?
    Convoquant la philosophie, Vincent Coussedière révèle le patriotisme méconnu de Rousseau et de l’esprit des Lumières.
    Relisant notre histoire récente, il montre comment le néo-républicanisme des années 1980 aura été le grand fossoyeur des idées qu’il prétendait défendre. Décryptant aujourd’hui, il éclaire la fin des politiques et le retour des intellectuels républicains, de Régis Debray à Alain Finkielkraut. Et si ces penseurs en rupture de ban étaient avant tout les porte-voix de l’opinion, abandonnée et méprisée par les élites ? Et si le « populisme ambiant » n’était pas le problème, mais la solution de la crise actuelle ? Et s’il était temps, enfin, de réhabiliter le Peuple ? "

     

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  • Sur le nouvel individualisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Jean-Pierre Le Goff à l'hebdomadaire Marianne à l'occasion de la sortie de son dernier livre Malaise dans la démocratie (Stock, 2016). Philosophe et sociologue, Jean-Pierre Le Goff a récemment publié La gauche à l'épreuve : 1968 - 2011 (Tempus, 2011) et La fin du village (Gallimard, 2012).

     

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    Entretien avec Jean-Pierre Le Goff sur le nouvel individualisme

    Marianne : Dans votre dernier livre, Malaise dans la démocratie, vous décrivez – et déplorez – l’avènement d’un « individualisme moderne ». Comment le définiriez-vous ?

    Jean-Pierre Le Goff : Rassurons tout de suite nos lecteurs, tout n’est pas à jeter, loin de là, dans la modernité et je ne confonds pas la modernité avec ses évolutions problématiques de la dernière partie du xxe siècle que j’ai traitées dans mon livre. Pour le dire de façon schématique, avec l’avènement de la démocratie, l’individu a été amené à se détacher des communautés premières d’appartenance. Les Lumières ont valorisé l’usage de la raison, le recul réflexif, l’autonomie de jugement : c’est le bon côté de l’individualisme moderne. Mais ce dernier est ambivalent : il existe aussi une tendance au repli sur la sphère individuelle et une désaffiliation historique. Tocqueville l’avait brillamment pressenti quand il a écrit De la Démocratie en Amérique : «  [Chaque homme] n'existe qu'en lui-même et pour lui seul, et s'il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu'il n'a plus de patrie. » 

    Pendant longtemps, ce phénomène de repli a été contrebalancé par la vitalité d’un tissu associatif qui amenait l’individu à s’intéresser aux affaires de la cité. En France, le mouvement syndical, les associations d’éducation populaire comme « Peuple et culture », ou encore celles liées au christianisme qui s’investissaient dans le domaine social ont joué ce rôle, sur fond d’un sentiment d’appartenance national qui demeurait bien présent. On pouvait se quereller sur l’histoire du pays et son interprétation mais cette histoire constituait un arrière fond de référence. Cet équilibre entre individualisme, engagement et appartenance collective a été rompu et a débouché sur un individualisme de type nouveau. 

    Quand cet équilibre s’est il rompu ?

    J-P LG : Dans mon livre, je parle du basculement qui s’est déroulé dans la seconde moitié du xxe siècle et il est possible de distinguer deux moments qui sont liés. D’abord, le tournant des années 1950-1960, après la phase de reconstruction de l’après-guerre, les sociétés démocratiques européennes ont inauguré une nouvelle phase de leur histoire, où la question du paupérisme – qui hantait la société depuis le xixe siècle et bien avant – a été globalement résolue. Avec le développement de la production, des sciences et des techniques, nous sommes entrés dans la « société de consommation, de loisirs et des mass-medias ». Les week-ends passés pour soi, les loisirs, la télé, la radio et la voiture... tout cela a érodé les rapports de sociabilité traditionnels. C’est dans ces nouvelles conditions sociales-historiques, que l’individualisme moderne s’est transformé. Cet individualisme ne correspond plus alors à la vision que la gauche, notamment, se faisait du citoyen-militant, à savoir quelqu’un qui serait constamment « impliqué » dans les affaires de la cité, avec un aspect dévoué et sacrificiel assez prononcé.

    La deuxième étape renvoie à ce j’ai appelé « l’héritage impossible » de mai 68. Je parle bien de l’héritage impossible et non de l’événement historique lui-même. C’est ma différence avec Eric Zemmour et d’autres critiques qui ont un aspect « revanchard » : je ne  règle pas des comptes avec l’événement historique et les soixante-huitards ne sont pas responsables de tous les maux que nous connaissons aujourd’hui. En France, l’événement mai 68 a été un événement à multiples facettes où ont coexisté la « Commune étudiante », une grève générale qui rappelait les grandes heures du mouvement ouvrier et une prise de parole multiforme qui a été largement vécue comme une véritable libération dans le climat de l’époque. L’événement historique Mai 68 n’appartient à personne, c’est un événement important de l’Histoire de France, et plus globalement des sociétés développées de l’après-guerre qui sont entrées dans une nouvelle phase de leur histoire et ont vu surgir un nouvel acteur : la jeunesse étudiante. Ce que le regretté Paul Yonnet a appelé le « peuple adolescent ». En ce se sens, à l’époque, Edgar Morin est l’un de ceux qui a le mieux perçu la caractère inédit de l’événement en caractérisant la « Commune étudiante » comme un « 1789 socio-juvénile ».

    Et en quoi, donc, les suites de Mai 68 ont-elles selon vous transformé notre société, et mené au nouvel individualisme qui vous préoccupe tant ?

    J-P LG : Cet « héritage impossible » est présent dans l’événement lui-même, plus précisément au sein de la « Commune étudiante », et il va se développer dans les années de l’après mai. Cet héritage comporte des éléments qui, au terme de tout un parcours de transgression et de désillusion, vont déboucher sur l’avènement d’un  individualisme de déliaison et de désaffiliation. Je résumerai schématiquement ce legs en quatre points : l’autonomie érigée en absolu, le rejet de toute forme de pouvoir (forcément synonyme de domination et d’aliénation), la mémoire pénitentielle, et cette idée que l’homme est naturellement bon, que tout le mal vient du pouvoir, des institutions, de la morale… qui pervertissent cette bonté naturelle.

    Des années post-soixante-huit à aujourd’hui, les pages sombres de l’histoire française, européenne et occidentale ont été exhumées et mises en exergue dans une logique de règlement de compte qui a conduit à une rupture dans la transmission. La responsabilité précise des « soixante-huitards », à qui l’on a fait porter bien d’autres chapeaux, est liée à cette rupture dans la transmission. Elle est importante et a notamment bouleversé notre rapport à l’enfant, à son éducation, à l’école… En 68, les slogans dénonçaient une société qui méprisait sa jeunesse  - « Sois jeune et tais toi ! ». Depuis, c’est « sois jeune et parle ! », car on considère que l’enfant a en lui-même un potentiel de créativité méconnu, et l’on n’est pas loin de penser que tout ce qu’il peut dire est nécessairement salutaire et  brillant…

    Et s’il ne parle pas, c’est qu’il n’est pas « normal »… Alors, si c’est nécessaire, on pourra consulter les nombreux spécialistes de l’enfance qui ont les moyens psychologiques et pédagogiques de le faire parler… (il rit). C’est l’image inversée de l’enfant de l’ancien monde d’avant 68 qui a débouché sur une nouveau modèle éducatif dont les effets problématiques ont été longtemps masqués ou sous-estimés. À cette « révolution culturelle » va venir s’ajouter le développement du chômage de masse, la conjugaison des deux a produit des effets de déstructuration anthropologique

    Selon vous, l’individualiste moderne qui peuple nos sociétés occidentales est un « faux gentil ». Pourtant, à première vue, il a l’air assez sympathique : pacifique, zen, ouverts aux autres cultures… Que lui reprochez-vous ?

    J-P LG : J’essaie d’abord de comprendre comment fonctionne un individualisme de type nouveau. Pour le dire de façon schématique : il est très autocentré et sentimental, se vit comme le centre du tout, en ayant tendance à penser que le monde est la prolongation de lui-même. Contrairement aux apparences, il n’est pas si « ouvert » à l’autre qu’il y paraît, considérant celui-ci avant tout selon sa mesure et son bon plaisir, en ayant quelques difficultés à comprendre que le monde est plus compliqué que le schéma binaire des gentils et des méchants. Cet individualisme est gentil avec les gens qui lui ressemblent mais supporte difficilement les contraintes, les échecs, les contradictions et les conflits.

    Cette structure de la personnalité est liée à une éducation historiquement inédite où les adultes ont placé les nouvelles générations dans des situations paradoxales. D’un côté, l’enfant a été extrêmement valorisé : depuis des décennies,  il est  « placé au centre »… Le bambin est considéré comme un génie méconnu à qui l’on offre enfin la possibilité d’épanouir toutes ses potentialités créatrices qui s’affirment comme on ne l’avait jamais vu auparavant ! Tous les enfants – c’est désormais comme une évidence –, sont des poètes qui s’ignorent ; on expose leur moindre gribouillis en les considérant sinon comme une œuvre d’art, du moins comme la preuve tangible de leur créativité… (il rit) D’ailleurs, globalement, les parents ne comprennent pas – de nombreux professeurs au bout du rouleau peuvent en témoigner – que l’aptitude brillante de leur bambin surinvesti par leurs attentes ne soit pas reconnue comme ils estiment qu’elle devrait l’être. En même temps: ces enfants sont  abandonnés…

    Abandonnés ? Mais vous disez à l’instant qu’ils étaient surinvestis et mis au centre de tout ? 

    J-P LG : C’est là tout le paradoxe : abandonnés, oui, par des parents qui bien souvent rechignent aux devoirs qu’implique le fait d’avoir un enfant et de l’éduquer, de l’aider et de l’accompagner dans le cheminement qui l’amènera vers l’âge adulte avec l’autorité et les contraintes qui en découlent. Du reste, ils n’ont pas trop le temps de s’en occuper. J’ai connu une féministe à la bonne époque qui disait à son enfant : « Tu ne m’empêcheras pas de vivre ma vie. » Quelle phrase terrible… D’un côté « l’enfant au centre », celui qui est l’objet de toutes les attentions et d’un amour quasi fusionnel, celui qui correspond à l’image fantasmée que s’en font les adultes, celui qu’on montre et qu’on affiche volontiers comme un petit roi, et de l’autre l’enfant contraignant (et agité) qui agace et vient contrarier le désir de vivre sa vie comme on l’entend en toute autonomie. Qu’on ne s’étonne pas alors de rencontrer de plus en plus en plus d’individus imbus d’eux-mêmes et prétentieux, en même temps que très anxieux et fragiles : c’est le résultat d’un profond bouleversement de ce que j’appelle dans mon livre le « nouveau terreau éducatif », lié notamment à la conjugaison de l’« enfant du désir » et de la « culture psy ».

    Dans votre livre, vous reprenez et développez la notion que feu votre ami, le sociologue Paul Yonnet, appelait « l’enfant du désir d’enfant » – le fait que l’enfant n’est désormais plus une donnée de la nature, mais le fruit d’un désir (1). Le problème avec ces analyses qui décortiquent les conséquences de ces bouleversements sociologiques, tout comme ceux entrainés par le travail des femmes (qu’Eric Zemmour a quasi décrété catastrophe humanitaire), c’est qu’on ne voit pas toujours quelles conclusions en tirer… Prônez-vous de remettre les femmes aux fourneaux ?, d’interdire la contraception ?

    J-P LG : Pas du tout ! Je pense que l’une des grandes luttes du xxe siècle a été celle de la libération des femmes. Je suis très critique vis-à-vis de l’idéologie féministe qui a versé dans le fantasme de la toute puissance dans l’après 68 et continue sous d’autres formes aujourd’hui, mais cela n’implique pas de nier le caractère émancipateur du combat des femmes qui a traversé le siècle et participe de l’individualisme démocratique au bon sens du terme : l’individu s’affirme comme un sujet autonome et responsable et ne se réduit pas au rôle social qu’on entend lui faire jouer. Comme je l’ai dit précédemment, cet individualisme a basculé à un moment donné vers de nouveaux horizons problématiques. Je ne veux pas pour autant revenir à la situation antérieure et je ne crois pas que cela soit possible. Je ne suis pas dans la nostalgie pavlovienne du « c’était mieux avant ». Si vous me permettez cette nuance paradoxale, je suis conservateur au sein même de la modernité et à partir des acquis de la modernité (2), ce qui permet d’examiner le passé en toute liberté en essayant d’en dégager un certain nombre de leçons.

    Dans l’ancien type d’éducation, il y avait des violences, l’enfant était vu comme un petit animal à dresser, la famille s’ordonnait autour de la volonté du père, le statut du divorce était dur et l’on ne maîtrisait pas la contraception… Mais il ne suffit pas de dire cela pour être quitte en se donnant bonne conscience alors que les drames familiaux remplissent quotidiennement la rubrique des « faits divers ». Dans le domaine de l’éducation comme dans beaucoup d’autres, nous sommes dans un rapport dépréciatif au passé qui le considère comme ringard sinon barbare. On est dans le simplisme et la caricature. La réalité est beaucoup plus ambivalente : dans l’ancien monde, il y avait certes des aspects problématiques, cela pouvait être dur, injuste, mais les anciens n’étaient pas des « abrutis » ou des « beaufs » comme le gauchisme culturel l’a laissé entendre. Dans mon livre, j’ai voulu précisément mettre en lumière les conceptions différentes de la condition humaine qu’impliquent les anciennes et les nouvelles méthodes d’éducation. Cette mise en perspective de l’ancien et du nouveau monde permet de tirer des leçons. Il ne s’agit pas de croire que l’on pourrait appliquer pareillement les mêmes méthodes qu’auparavant, mais le passé peut être source d’inspiration et de rééquilibrage contre les impasses du nouvel individualisme et de ses méthodes d’éducation.

    Quelles sont ces leçons ?

    J-P LG : L’éducation était antérieurement liée à une conception pour qui les contraintes, la limite, le tragique étaient considérés comme inhérents à la condition humaine, tout autant que les plaisirs de la vie, la sociabilité et la solidarité. Devenir adulte c’était accepter cette situation au terme de tout un parcours qui distinguait clairement et respectait les différentes étapes de la vie marquées par des rituels qui inséraient progressivement l’enfant dans la collectivité. C’est précisément cette conception qui s’est trouvée mise à mal au profit nom d’une conception nouvelle de l’enfance et de l’adolescence qui a érigé ces étapes spécifiques de la vie en des sortes de modèles culturels de référence. Valoriser les enfants et les adolescents en les considérant d’emblée comme des adultes et des citoyens responsables, c’est non seulement ne pas respecter la singularité de ces étapes de la vie, mais c’est engendrer à terme des « adultes mal finis » et des citoyens irresponsables. Aujourd’hui, il y a un écrasement des différentes étapes au profit d’un enfant qui doit être autonome et quasiment citoyen dès son plus jeune âge. Et qui doit parler comme un adulte à propos de tout et de n’importe quoi. On en voit des traces à la télévision tous les jours, par exemple quand un enfant vante une émission de télévision en appelant les adultes à la regarder ou pire encore dans une publicité insupportable pour Renault où un enfant-singe-savant en costume co-présente les bienfaits d’une voiture électrique avec son homologue adulte… Cette instrumentalisation et cet étalage de l’enfant-singe sont obscènes et dégradants. Les adultes en sont responsables et les enfants victimes. Paul Yonnet a été le premier à mettre en lumière non seulement l’émergence de « l’enfant du désir » mais celui du « peuple adolescent ». Dans la société, la période de l’adolescence avec son intensité et ses comportements transgressifs a été mise en exergue comme le centre de la vie. Cette période transitoire de la vie semble durer de plus en plus longtemps, le chômage des jeunes n’arrange pas les choses et les « adultes mal finis » ont du mal à la quitter.

    Tout ce qui va au delà peut apparaître comme une forme de déchéance, une insertion difficile dans une réalité contraignante et insupportable au regard de ses rêves et des ses désirs de jeunesse. La nostalgie n’est plus ce qu’elle était et les « revivals », pas seulement musicaux, connaissent un succès sans précédent. Et voilà comment vous avez des gens à 70 printemps, qui gratouillent la guitare et qui jouent les Hell’s Angels avec leur couette et leurs boucles d’oreille sur des motos genre Harley Davidson… Je tiens à préciser que j’adore le jazz, le rock, la pop, la chanson française…, sans pour autant me limiter à ces genres musicaux, croire que tout se vaut et que n’existe pas une hiérarchie dans le domaine des œuvres culturelles, la musique classique demeurant pour moi une référence. Ma génération a saturé l’image de la toute puissance de la jeunesse et certains ex-soixante-huitards et quelques-uns de leurs descendants constituent des sortes « d’arrêts sur images » assez pathétiques. Mais l’âge et l’expérience aidant, on peut parvenir à une forme de réflexion et de sagesse qui allie la réflexion critique et la responsabilité. Je ne crois pas que tous les possibles de la vie soient ouverts jusqu’à 80 ans et plus... Le problème est que nombre de médias entretiennent l’illusion de l’éternelle jeunesse et jouent ce jeu à fond. Ils sont dans le jeunisme et dans la fête de la transgression socialement assistée à longueur de temps : le conformisme de l’anticonformisme où règnent les perpétuels adolescents et les nouveaux « m’as-tu-vu ». Nous arrivons au point limite de cette tendance qui s’épuise et finit par lasser les acteurs et les spectateurs de la transgression banalisée, de l’euphorie et de la dérision obligatoires.

    Cet écrasement des différents stades ne se fait-il pas au détriment de l’adulte et de sa réflexion d’adulte ? On multiplie les micros-trottoirs de cour de récré sur l’actualité, Le Monde publie même une pleine page d’un dessinateur pour enfants afin d’expliquer la crise des réfugiés. L’arrière pensée étant : « la vérité sort de la bouche des enfants. » Est-ce que l’homme moderne ne se compromet pas dans une sorte de manichéisme enfantin ?

    J-P LG : Oui, mais c’est largement un trompe l’œil. En vérité, c’est bien lui-même que l’adulte projette dans l’enfant. Sous prétexte de mettre en valeur le bambin, on nous refourgue l’image de l’enfant tel que nous voudrions qu’il soit. Les enfants sont devenus les miroirs dans lequel les adultes aiment percevoir non seulement une innocence première qu’ils ont perdue, mais une sorte d’adulte autonome en miniature, créateur et citoyen avant l’heure, l’image idéalisée d’eux-mêmes correspondant au modèle social du nouvel air du temps. Ce qui tend à nier le statut d’être infantile et dépendant et a l’avantage de croire que l’on n’aurait pas trop à s’en occuper. Du reste, on confie les enfants une bonne partie du temps à des spécialistes qui entretiennent et reproduisent cette même image de l’enfant autonome et citoyen. C’est en ce sens que, oui, il y a abandon par refus de reconnaître la fragilité de l’enfant et les devoirs que cela implique. Ce fantasme de l’enfant autonome, qui parle comme un adulte, qui a un point de vue sur tout et que l’on va solliciter pour qu’il corresponde à cette image, est une forme d’abandon. On peut résumer ce rapport paradoxal qui allie valorisation et rejet dans le phénomène de « l’enfant ours » courant dans certains milieux : dans les dîners, on va chercher le gamin pour le montrer à ses amis – « regardez comme il est beau et génial » – c’est tout juste si on ne le fait pas jouer du violon –, et puis au bout de quelques minutes : « Écoute maintenant c’est terminé, tu ne nous embêtes plus… » Le paradoxe sous-jacent reste le même : nous aimons intensément notre enfant que nous trouvons formidable et nous tenons à le faire savoir, mais il ne faudrait quand même pas qu’il nous empêche de vivre pleinement notre vie en toute autonomie. Cette situation paradoxale dans laquelle on place l’enfant est inséparable de la difficulté des adultes à devenir adultes, c’est-à-dire à quitter ce stade de la vie qu’est l’adolescence qui valorise l’intensité des sentiments dans le présent, entend passer outre les devoirs et les contraintes, pour qui la vie demeure éternellement ouverte sur tous les possibles. L’amour se doit d’être intense et fusionnel, autrement ce n’est pas vraiment de l’amour, d’où la grande difficulté à l’insérer dans la durée. Alors, à la première désillusion et engueulade, qui ne manquent pas de survenir au fil du temps, on se sépare ou on  divorce !

    On n’a qu’à revenir au mariage de raison, tant que vous y êtes… 

    J-P LG : (il rit). Bien sûr que non. L’alliance basée avant tout sur l’amour vaut mieux que les mariages arrangés de l’ancien monde, encore que, dans certains mariages arrangés, l’amour n’était pas toujours absent. Mais les sentiments sont devenus des critères essentiels de l’union, en dehors même de leur inscription dans un ordre généalogique et juridique qui les insère dans un temps long. Soumise à l’hégémonie des sentiments et à leur versatilité, l’union qui se veut authentique s’est en même temps fragilisée, passant facilement de l’amour fusionnel à la haine et au ressentiment, faute d’un décentrement et d’une référence à un ordre institutionnel pouvant permettre un recul salutaire face aux aléas et aux déconvenues d’un moment. Là aussi, le déni fonctionne à plein, tout particulièrement quand les séparations impliquent des enfants : on se rassure tant bien que mal en disant que les séparations et les divorces sont devenus banals et que cela pourrait se passer sans trop de dégâts, quitte à envoyer le ou les enfants chez un psy. Tous ces efforts pour effacer la responsabilité et la culpabilité des parents n’empêchent pas les enfants d’être les premières victimes de la désunion. On touche une différence essentielle entre l’ancien monde et le nouveau : comment l’on construit une famille dans la durée et comment l’institution que constitue le mariage permet de vous décentrer d’une relation duale de type fusionnel et simplement sentimentale, de vous inscrire dans une généalogie, dans un temps long qui tissent le fil des générations. 

    Comme quelques autres, vous déplorez une « pensée dominante », notamment dans les grands médias. Mais, enfin : entre Alain Finkielkraut, Michel Onfray, Régis Debray, Marcel Gauchet ou encore vous–même, on ne peut pas dire que le « gauchisme culturel » pour reprendre votre notion soit si bien représenté en une des magazines, ni dans les ventes en librairies ! 

    J-P LG : On assiste, c’est vrai, à la fin d’un cycle historique, mais, si j’ose dire celui-ci « n’en finit pas de finir »… Ceux qui sont nés dans la marmite du gauchisme culturel, c’est à dire ceux qui étaient adolescents après mai 68 ont développé une posture d’anticonformiste et d’imprécateur, rejouant la énième version de l’antifascisme, donnant constamment des leçons au peuple qui a voté Front national, avec les résultats que l’on sait. Ce que j’ai appelé le  gauchisme culturel (3) a servi de substitut à la crise de la doctrine de la gauche dans les années 1980, à l’heure du mitterrandisme triomphant.

    Son hégémonie est aujourd’hui battue en brèche (4) et ses représentants voient d’ailleurs que le vent tourne en leur défaveur, tout en continuant de se prétendre les représentants d’une certaine idée du Bien, d’une gauche pure, morale et authentique, contre toutes les « trahisons ». Ces gens-là vivent dans un monde de plus en plus coupé de la société et de ses évolutions qu’ils ne comprennent pas, les réduisant bêtement à la montée inexorable de la « réaction », du fascisme, de la xénophobie, du racisme et maintenant de « l’islamophobie » au moment même où la terreur islamique exerce ses ravages… Ils se sont créés un  monde  à part, angélique, où ils vivent dans l’entre-soi célébrant de grandes valeurs générales et généreuses : ouverture, multiculturalisme invertébré, gentillesse, pacifisme… Ce sont les gardiens des « villages Potemkine » de la post-modernité. Ils se tiennent chaud, y compris économiquement et socialement, dans un  milieu à l’écart de l’épreuve du réel et ils ne cessent de célébrer leur monde rêvé sous la forme de multiples fêtes.

    Tout se passe comme dans La ville qui n’existait pas, bande dessinée d’Enki Bilal et de Pierre Christin (5), une « cité à l’abri des autres hommes et de leurs cris, des autres villes et de leur crasse », ville littéralement mise sous une cloche transparente, ville aux couleurs chatoyantes, avec ses fêtes et ses défilés de carnaval, avec ses manèges et ses multiples attractions. En dehors de cette ville sous cloche, « parfaite et hors du temps », c’est la désolation, le chômage dans un paysage industriel en ruine… Cette bande dessinée qui date de la fin des années 1970 et a un côté science-fiction n’est plus si éloignée de la réalité ! Paris et les grandes métropoles mondialisées ressemblent à cette « ville qui n’existait pas ». Prenez par exemple Lille, qui voudrait devenir une capitale de l’art contemporain et dont les manifestations s’exposent dans nombre d’anciennes usines. Il n’est pas besoin d’aller bien loin en dehors de cette bulle pour voir la misère et la déstructuration liée au chômage de masse. C’est une fracture à la fois sociale et culturelle, accentuée par certains grands médias qui entretiennent  à leur façon un monde fictif « où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ». 

    Quant aux succès de librairie, il ne faudrait quand même pas oublier les multiples best-sellers liés à l’écologie fondamentaliste – qui ne se confond pas avec les problèmes réels que posent l’écologie –, les succès des livres sur le bien-être, la réconciliation avec soi-même, avec les autres et avec la nature, les méditations et les exercices en tout genre qui développent, comme je le montre dans mon livre, un angélisme et un pacifisme qui tentent de mettre les individus à l’abri des désordres du monde et nous désarment face aux ennemis qui veulent nous détruire. Mais je vous l’accorde : on arrive peut-être à la fin de ce courant qui dure depuis des années. Les attentats terroristes, la vague de migrants qui arrivent en Europe, l’impuissance de l’Union européenne, les effets d’une mondialisation économique libérale, le chômage de masse… constituent autant d’épreuves auxquelles il est difficile d’échapper. Sauf à mener une sorte de « politique de l’autruche » qui me paraît encore être pratiquée par une partie de la classe médiatique, politique et intellectuelle française et européenne. Mais la coupure avec la réalité est telle qu’elle ne peut plus être dissimulée comme elle l’a été auparavant. A chaque fois, on « remet le couvercle », mais  cela devient de plus en plus difficile et ça déborde…

    C’est ce que vous appelez « le point limite » ? Il y a quoi derrière ? 

    J-P LG : Ce n’est pas parce que cette période historique est en train de finir que ce qui va suivre est nécessairement réjouissant. Le monde fictif et angélique  qui s’est construit pendant des années – auquel du reste, à sa manière, l’Union européenne a participé en pratiquant la fuite en avant – craque de toutes parts, il se décompose et cela renforce le désarroi et le chaos. La confusion, les fondamentalismes, le communautarisme, l’extrême droite gagnent du terrain… Le tout  peut déboucher sur des formes de conflits ethniques et des formes larvées de guerre civile y compris au sein de l’Union européenne. On en aura vraiment fini avec cette situation que si une dynamique nouvelle émerge au sein des pays démocratiques, ce qui implique un travail de reconstruction, auquel les intellectuels ont leur part. Il importe tout particulièrement de mener un travail de reculturation au sein d’un pays et d’une Europe qui ne semblent plus savoir d’où ils viennent, qui il sont et où il vont. Tout n’est pas perdu : on voit bien, aujourd’hui, qu’existe une demande encore confuse, mais réelle de retour du collectif, d’institutions et d’un Etat cohérent qui puissent affronter les nouveaux désordres du monde. Ce sont des signes positifs.

    L’écrivain et journaliste Kamel Daoud a récemment annoncé qu’il entendait se mettre en retrait du journalisme (6). Ses mises en garde contre les dangers de l’islamisme lui ont valu, il y a un an, une fatwa émise depuis son pays, l’Algérie. Mais c’est apparemment les invectives du camp des « bien-pensants », et notamment la tribune d’un collectif d’anthropologues et de sociologues parue dans Le Monde, l’accusant d’islamophobie, qui aura eu raison de son énergie. Etes vous d’accord avec Jacques Julliard quand il écrit que « l’intimidation, l’interdit et la peur dominent aujourd’hui le débat » ? 

    J-P LG : Sur la question de l’islamisme, oui ! Avec un phénomène de prise en étau. Car vous avez d’un côté, l’islamisme radical qui exerce ses propres menaces, y compris sur la sécurité des personnes, et de l’autre côté, un phénomène de pression sourde, au sein même de la société. Certains pensent tout bas : « J’aurais des choses à dire mais je préfère les garder pour moi sinon cela risque de m’attirer des ennuis. » Quand on commence à raisonner de la sorte, on cède à une pression qui met en cause la libre réflexion et la liberté d’opinion. Ces dernières, oui, doivent faire face aux coups de boutoirs de la nouvelle police de la pensée et de la parole qui fait pression sur tout le monde en dégainant son accusation d’islamophobie à tout va et en n’hésitant pas à porter plainte à la moindre occasion.

    Elisabeth Badinder dans les colonnes de Marianne, ou Chantal Delsol, dans celles du Figaro, évoquent les années 70, et les procès d’intention en fascisme à tout bout de champ…

    J-P LG : Il peut y avoir de ça, mais la situation actuelle comporte une différence  essentielle : aujourd’hui, quand vous accusez un tel ou un tel d’« islamophobie », vous désignez des cibles à des gens qui ne sont pas simplement dans le débat et la polémique avec les outrances et les schémas des années 1970. Vous les désignez à l’ennemi. C’est grave. Ces sociologues et anthropologues patentés ont tout de même dénoncé un intellectuel algérien qui connaît bien l’islamisme et fait preuve de courage en mettant sa vie en jeu. Il faut appeler un chat un chat. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de débat et de confrontation possibles, qu’il faille restreindre la liberté d’expression et les controverses, mais il faut faire attention. Le pluralisme, la critique et la polémiques sont inhérents au débat démocratique, mais encore s’agit-il d’ajouter que celui-ci n’a de sens que s’il existe un ethos commun impliquant un sens de la responsabilité, faute de quoi la référence à la liberté d’expression peut servir à justifier les dénonciations en tout genre.

    Les réseaux sociaux bruissent désormais d’odieuses insultes du type « collabeur » à chaque coin de la toile… C’est quand même un climat pourri, qui empêche la libre réflexion et le débat de fond, pourtant absolument indispensables sur ces questions. Je crains que les difficultés et les pressions pour empêcher d’aborder librement les questions relatives à l’islam se développent au fil des ans sous prétexte de ne pas heurter la sensibilité de nos compatriotes de religion musulmane. Ce serait un grave coup porté à liberté de pensée et à l’Europe qui est précisément le « continent de la vie interrogée ». Dans ce domaine, les intellectuels ont un rôle important à jouer en faisant valoir une liberté de pensée qui n’est pas négociable.

    Jean-Pierre Le Goff, propos recueillis par Anne Rosencher (Marianne, 13 mars 2016)

     

    Notes

    (1) Cf. « Comment être à la fois conservateur, moderne et social ? », Le Débat, n° 188, janvier-février 2016.

    (2) Malaise dans la démocratie, Ed. Stock

    (3) « Du gauchisme culturel et de ses avatars », Le Débat, n° 176, avril-mai 2013.

    (4) « L’entretien du camp du Bien battue en brèche », Revue des deux mondes, février-mars 2016.

    (5) Enki Bilal, Pierre Christin, « La ville qui n’existait pas », in Légendes d’aujourd’hui 1975-1977, Casterman, 2007. 

    (6) Kamel Daoud, Lettre à un ami étranger

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